ÉRIC LAPOINTE
INVITEZ LES VAUTOURS (1996)
Star STR-CD-8077 - distribution Sélect
durée: 46'19"

L'impression que je garde d'une première écoute de ce deuxième album d'Éric Lapointe se résume en un mot: agressivité. Les notes initiales de guitare électrique de la première chanson, auxquelles vient s'ajouter la voix de «rocker» de Lapointe, donnent le ton à cette collection de onze chansons parmi lesquelles seule la dernière, sur un arrangement de quatuor à cordes réalisé par André Gagnon, échappe à l'impression d'ensemble.

Il faut bien se rendre à l'évidence toutefois qu'avec mes cinquante-deux ans bien comptés, je ne fais pas partie du public-cible d'Éric Lapointe qui, avec Kevin Parent et quelques autres, constitue un des jeunes loups de la chanson auprès de la génération montante; il me semble que tout autre commentaire que je pourrais ajouter serait superflu, et c'est pourquoi j'ai résolu de demander au jeune homme qui m'a prêté le CD «pour savoir ce que j'en pensais» s'il n'accepterait pas d'en rédiger une critique que je m'engagerais alors à reproduire ici. N'est-ce pas que l'opinion d'un jeune homme de quinze ans serait pas mal plus pertinente que la mienne?

Alors voici ce qu'il en pense:

Lorsque R.G. m'a proposé d'écrire cette critique, je voulais prendre le temps d'écouter plusieurs fois ce deuxième album d'Éric Lapointe que j'ai reçu en cadeau. Avant même d'entamer la première audition, j'étais un peu rébarbatif mais je m'ordonnai de lui donner une chance. Cette méfiance était due à quelque chose de très simple: je trouve Éric Lapointe criard et bruyant. La première écoute n'a pas su dissiper mes idées préconçues.

Maintenant avec mes seize ans bien sonnés, j'essaierai d'être concis en faisant toutefois preuve de truculence à l'égard de ce jeune chanteur. Du côté musical, Lapointe est accompagné d'une bonne bande de musiciens. Il y a des chansons qui dévoilent de beaux passages de guitare sèche et de piano. Je ne peux, malheureusement, pas dire la même chose des virulentes intonations que Lapointe y ajoute. En somme, les adeptes du «rock agressif» seront sans doute rassasiés par ce disque qui fourmille de notes et de solos de guitare électrique. Pour ceux qui préfèrent les voix plus harmonieuses, c'est peut-être préférable d'éviter ce disque. Du point de vue textuel, je n'ai pas été impressionné. Les paroles ne sont pas des plus mémorables; il est nécessaire d'ajouter que Lapointe a, parfois, des choses intéressantes à dire. En ce qui a trait à la piste 5 («Elle dort avec moi»), je reste choqué. Je trouve que cette chanson est de mauvais goût puisqu'on y traite la femme en vulgaire trophée, un objet ou une sorte de machine à sexe. Il reste à ajouter que la musique de cette cacophonie est insipide puisque c'est un amoncellement de sons agressifs. Ensuite, Lapointe enchaîne avec la piste 6 («Deux fois la même histoire»), qui est une sorte de plainte désespérée qui remet les paroles «macho» de «Elle dort avec moi» sur la sellette.

Voilà une autre faiblesse du disque: il n'y a pas de cohésion. Les textes vont dans tous les sens, il n'y a pas de thème très précis, sinon le désarroi et la haine.

Je suis d'accord avec R.G. en ce qui a trait à la piste finale, «D' l'amour, j'en veux pus». Ce texte de Plamondon est sans doute le point culminant de l'album d'un point de vue musical. Or, la juxtaposition de la voix éraillée du jeune «rocker» crée un effet déplacé et nuit à l'aspect mélodieux de la pièce. Un argument en la faveur de Lapointe stipulerait qu'il essayait d'exprimer ses émotions en vidant son for intérieur et en chantant de cette façon. À vous de juger!

Quant à moi, il y a mieux chez les jeunes chanteurs... écoutez donc Kevin Parent - malgré ce qu'en dit R.G.

- Vincent-Joël Proulx


... voici maintenant un autre son de cloche, que m'a fait parvenir un internaute suite à la lecture de la critique ci-haut:

Lapointe reste Lapointe dans toute son expression. Personne ne chante l'amour blessé comme Éric Lapointe. Ce jeune artiste à la voix rauque s'inscrit à la perfection dans la lignée des «rockers québécois». La tendance québécoise au niveau des paroles des chansons joue sur les événements et les émotions à leur état brut. Demandez à Kevin Parent, à Lynda Lemay et à tant d'autres auteurs-compositeurs-interprètes québécois.

Lapointe affiche son genre et impose sa façon de dire les choses dans ses textes. Il est unique et spécial. Dans le cas contraire, serait-il où il est présentement? Le Québécois se retrouve dans les chansons et la musique de Lapointe, peu importe le thème - si thème il y a et si thème il doit y avoir.

Criard et bruyant? Peut-être avec Marie-Stone mais combien intense et pur avec l'amour. Sans parler de l'authenticité de ses textes et des émotions qui les animent.

En résumé, Lapointe sait traduire et transposer les émotions sur le papier de façon intense et harmonieuse. Un rocker québécois qui prouve que l'amour et la passion ont leur place même dans le rock.

- Gilles Therrien
- Écrire à G. Therrien

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LISTE DES CHANSONS:
  • Priez!
  • Bobépine
  • Je rêve encore
  • Marche ou crève
  • Elle dort avec moi
  • Deux fois la même histoire
  • Loadé comme un gun
  • Satanière
  • Invitez les vautours
  • Laisse-moi seul
  • D'l'amour, j'en veux pus