Après avoir connu un succès considérable avec son premier album (MPVCD-1353), qui lui avait valu d'être choisi «Groupe de l'année» au Gala de l'ADISQ en 1996, Noir Silence nous présente aujourd'hui une seconde collection dans laquelle on trouve plusieurs des mêmes qualités. Quant à moi, ce sont les textes qui m'avaient d'abord séduit chez eux, et cela continue d'être le cas cette fois-ci. Que ce soit en réclamant le droit d'affirmer son identité (Le vent a tourné), en posant un regard acidulé sur une conception dépassée du rôle de la femme (L'homme de croc-magnon), ou en exprimant un mal de vivre qui n'est pas sans rappeler par moments celui de Nelligan ou de Rimbaud (Malade), Noir Silence se distingue par une écriture plus que convenable qui atteint parfois des sommets de pure poésie.
Ce qu'on ne trouve cependant pas, me semble-t-il, dans cet album, c'est un «tube» du même ordre que On jase de toi, qui avait contribué de façon significative au succès du précédent. Reste à voir si leur public leur demeurera fidèle en se voyant offrir des textes dont même les plus faibles supposent chez l'auditeur une capacité et une volonté de se pencher sur des «messages» d'une cohérence et d'une réflexion qui vont loin au-delà de ce qu'expriment la plupart de leurs contemporains. L'album n'offre, à vrai dire, qu'un seul texte qu'on pourrait qualifier de «léger»: en effet, on a emprunté à la génération précédente Méo Penché des Jérolas, et on l'a habillé du «son» de Noir Silence pour en faire une interprétation que ne renieraient pas, je pense, ses créateurs.
Enfin, signalons la présence à la toute fin de l'album d'un petit cadeau qu'a sans doute voulu faire le groupe à ses «fans»: lorsque se termine le morceau instrumental Naissance, le dernier qui apparaît à la liste des titres, les plus perspicaces noteront que le compteur digital du lecteur de CD ne s'arrête pas et qu'il continue à égrener des secondes de silence... c'est qu'au bout d'environ une minute, on nous offre un joli dessert, un petit hors-d'oeuvre construit sur de belles harmonies à cinq voix et dont l'accompagnement se résume à des claquements de doigts en guise de percussion et à quelques accords isolés de guitare électrique. Car le grand-père que je suis, en dépit de tout le bien qu'il a pu dire de ce disque dans les paragraphes qui précèdent, et malgré qu'il accepte parfaitement la nécessité des décibels pour faire passer sa musique auprès de la génération actuelle, finit par trouver un tantinet monotone le «son» de Noir Silence, alors que ce morceau-ci démontre une musicalité chez eux que je souhaiterais les voir mettre davantage en valeur.
