Dossier: Les radios de langue française
de Montréal et de l'Outaouais


Un article publié dans le journal Le Droit du samedi 4 octobre 1997 (page 7) a attiré mon attention,
et j'ai voulu constituer ce dossier à l'intention des visiteurs de «chez Hergé».

Commençons par l'article lui-même:


Les radios des marchés bilingues veulent moins de chansons françaises

par ISABELLE DUCAS, du journal Le Droit

L'Association canadienne des radiodiffuseurs (ACR) demande que le taux de chansons en français soit réduit de 65% à 55% pour les stations de radio de l'Outaouais et de Montréal, des «marchés bilingues», selon elle.

La demande a été adressée au Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC), qui réexamine les politiques régissant la radio privée.

L'ACR justifie sa demande de réduire la proportion du contenu francophone en invoquant des raisons de concurrence.

«Les stations francophones dans des marchés bilingues comme Montréal et Ottawa-Hull ont une double concurrence: celle des autres stations francophones, et celle des stations anglophones avec des créneaux similaires, indique Michel Tremblay, vice-président exécutif de l'ACR. Nous sommes d'avis qu'il serait utile de considérer des exceptions pour ces marchés.»

Les stations francophones qui desservent le marché d'Ottawa-Hull sont, sur la bande FM, CIMF et CKTF, et CJRC sur la bande AM. Les trois sont situées au Québec.

Ces stations doivent combattre la tendance de l'auditoire à se mettre à l'écoute des stations de langue anglaise, souligne l'ACR.

La proportion de contenu francophone que doit diffuser la radio privée a été augmentée de 55% à 65% en 1990. Puisque le CRTC révise actuellement l'ensemble de ses politiques, l'ACR a voulu en profiter pour soulever les difficultés particulières qui éprouvent les stations de radio dans les «marchés bilingues».

«Pour s'assurer que la radio est concurrentielle, il faut être en contact avec la réalité du marché, souligne M. Tremblay. Ça ne sert à rien d'imposer des quotas qui ne reflètent pas les goûts des auditeurs.»

Le CRTC a reçu des mémoires d'organismes donnant leur avis sur les règles régissant la radio publique et tiendra le 1er décembre ses audiences publiques sur le sujet. On devrait savoir au printemps 1998 si des modifications seront apportées à ces règles.


J'ai réagi à cet article en faisant parvenir le texte suivant
à la chronique «Place publique» du journal,
et j'en ai envoyé une copie au CRTC.
Voici le texte de ma lettre:


J'ai été estomaqué de lire dans Le Droit du samedi 4 octobre une information selon laquelle nos stations de radio dites «francophones» demandent au CRTC une réduction de leur obligation de diffuser des chansons en français de 65% à 55%, prétextant leur situation concurrentielle face aux médias de langue anglaise.

En ce qui me concerne, je serais plutôt favorable à ce que cette exigence soit haussée à 90% ou plus, les francophones d'ici étant déjà suffisamment inondés de musique américaine. Car, voyez-vous, ceux des nôtres qui préfèrent la chanson d'expression anglaise savent déjà fort bien où s'adresser pour satisfaire à ce besoin... et, croyez-moi, ce n'est pas vers nos tristes stations «bilingues» qu'ils se tournent! Par contre ceux qui, comme moi, recherchent une radio qui soit vraiment française sont condamnés à rester sur leur faim en se contentant du traditionnel «petit pain» que représentent des postes de radio qui ne sont à mon sens qu'un autre parmi les instruments d'assimilation hélas! tellement efficaces qui rongent la vitalité de notre culture.

Curieuse de logique que celle de nos diffuseurs, qui sont d'avis que dans les milieux dits «bilingues» comme le nôtre, c'est en nous donnant davantage de musique anglaise qu'ils nous serviront mieux! Je leur dis que s'ils se sentent incapables d'affronter la concurrence des média anglophones autrement qu'en les imitant, il serait plus logique de leur part de fermer boutique, quitte à demander tout simplement un permis de diffuser en anglais! Et s'il ne devait en rester qu'un seul qui ait l'honnêteté intellectuelle d'utiliser un permis de station de langue française pour diffuser véritablement en français, cela représenterait une nette amélioration par rapport à la situation actuelle. Mais quant à espérer qu'ils renversent la vapeur, ou que le CRTC ait le courage de leur rappeler ce que devrait signifier un permis de diffuser en français...


Ce communiqué du mouvement «Impératif français»
va dans le même sens:


Dans le cadre de l'Examen des politiques du Conseil (CRTC) concernant la radio commerciale, Impératif français tient à s'opposer à toute tentative qui aurait pour effet de réduire le pourcentage déjà trop faible de chansons en français diffusées par les stations de radio commerciale de l'Outaouais et de Montréal.

Le président d'Impératif français, M. Jean-Paul Perreault, déclare que «ce n'est sûrement pas en augmentant la durée consacrée à la diffusion de chansons en anglais que l'on développera le goût pour la chanson en français. Cela ne contribuerait qu'à développer davantage le goût pour la musique anglo-saxonne. Il s'agit là de vérités de La Palice.»

De plus il a ajouté: «La Francophonie et ses institutions n'ont pas à contribuer à leur banalisation en aidant à faire de la culture anglo-saxonne le seul modèle culturel au monde.

«Impératif français soumettra ses observations par écrit au CRTC afin de s'opposer à toute orientation qui aurait comme conséquence d'encourager l'assimilation linguistique et l'érosion culturelle», a conclu M. Perreault qui a ajouté: «Il faudrait que d'autres organismes et individus emboîtent le pas.»


Quelques mois plus tard, l'article suivant, toujours du journal Le Droit,
annonçait la décision du CRTC:


CIMF et CKTF obligées de franciser leur son

par Mathieu Turbide, du journal Le Droit

La décision du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) de forcer les stations de radio privées francophones de diffuser au moins 55% de musique francophone entre 6 h et 18 h risque de modifier considérablement le visage des deux stations FM de l'Outaouais: CKTF 104,1 et CIMF 94,9.

Les deux stations de radio avaient joint leurs voix à une demande des radiodiffuseurs privés, l'automne dernier, afin de réduire le quota de musique francophone de 65% à 55% sur une base hebdomadaire.

Non seulement le CRTC a-t-il refusé la requête des diffuseurs en maintenant le quota à 65%, mais il exigera dorénavant que 55% des chansons diffusées aux heures de grande écoute, de 6 h à 18 h, soient francophones.

Jusque maintenant, bien des stations profitaient de la largesse de la réglementation et diffusaient l'essentiel de leur contenu francophone la nuit.

Ce n'est pas le mouvement Impératif français qui se plaindra de cette décision. Le groupe de pression outaouais réclamait même une augmentation du quota hebdomadaire de 65% à 75%.

«Cela représente une amélioration par rapport à la situation actuelle, puisque certaines stations commerciales diffusent aussi peu que 40% de musique en langue française aux heures de grande écoute afin de faire surtout place à la musique vocale anglophone, reléguant ainsi la chanson francophone aux heures de faible écoute», a commenté le président d'Impératif français, Jean-Paul Perreault.

M. Perreault se réjouit aussi de l'engagement du CRTC d'obliger les stations à diffuser intégralement et entièrement les chansons francophones, ce qui empêchera les diffuseurs de réduire la durée des chansons de langue française pour arriver plus rapidement au quota de 65%.

Les deux stations FM de l'Outaouais, CIMF et CKTF, n'ont pas réagi à la décision du CRTC. Il a été impossible de joindre le porte-parole du dossier pour le réseau Radiomutuel, de même que le directeur général de CIMF, Claude Gagné.


Mémoire déposé au CRTC par Impératif français


N.B.: Les textes du journal Le Droit sont reproduits avec la permission du journal; il en va de même de la reproduction du communiqué du mouvement «Impératif français», autorisée par M. Jean-Paul Perreault.

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